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Un bananier Hondurien
CAP SUR L'AFRIQUE

Et ainsi, au matin du 26 octobre, trois jours après son arrivée à Newport News, le Contessa tourna sa proue vers l'Afrique et son rendez-vous avec l'histoire.

Le navire était chargé de 900 tonnes de bombes et de 400 tonnes d'essence à haut degré d'octane, un chargement qui lui valut le surnom de "chandelle romaine".

En mer, le temps se mit au beau et le Contessa naviguait avec aisance. "Lorsque nous eûmes atteint les Açores, écrivit Leslie, je révélai notre destination au capitaine et, n'ayant aucune idée de l'endroit où se trouvait le convoi du débarquement, nous navigâmes de nuit sous un vent de nord-est modéré".

Le matin suivant, ils poursuivirent leur route vers l'Afrique du Nord. A l'aube du 6 novembre, un hydravion britannique basé à Gibraltar, le Sunderland, survola le navire et leur fit des sommations. Le Contessa qui ne disposait d'aucun code d'identification ne pût répondre. Le Sunderland se mit à effectuer des cercles au-dessus du navire et, bien qu'apparemment insatisfait, les quitta sans attaquer.

Le lendemain, un destroyer approcha le Contessa qui réussit à clarifier sa position par le biais d'une communication visuelle. C'était déjà le crépuscule lorsque le navire finit par trouver la place qui lui revenait dans la flotte d'invasion.

L'invasion était prévue pour le 8 novembre 1942. Bien avant l'aube, un groupe de dix-sept hommes chargé de couper le filet métallique, passèrent entre les deux jetées construites dans l'Atlantique pour confiner le courant et empêcher partiellement l'envasement de l'embouchure du fleuve. Ils atteignirent rapidement le filet qui formait un barrage entre les deux jetées et se mirent au travail. Malheureusement, des mitrailleuses installées au pied de la casbah, une ancienne forteresse construite par les portugais, qui défendait l'embouchure du fleuve Sebou, ouvrirent le feu et les chassèrent.

Ceci entraîna une modification des plans. En effet, il était prévu que Malevergne, embarqué à Newport News sur le croiseur Suzan B. Anthony, et transféré, dès l'approche de la côte marocaine, sur le Dallas, devait à l'aube piloter ce destroyer de 1919, vers l'amont du fleuve, afin d'ateindre l'aérodrome de Port-Lyautey avec un détachement de commandos. Au lieu de cela, dans la nuit, le Dallas tenta d'enfoncer le barrage mais les obus tirés par des batteries à terre l'en éloigna par deux fois.

Le Dallas
Ce ne fut qu'aux premières heures du 10 novembre 1942, deux jours plus tard, qu'une équipe réussit enfin à cisailler les câbles métalliques de 38 mm de diamètre. Une demi-heure après, Malevergne pilota le Dallas vers les jetées dans l'obscurité et sous une pluie battante. Malgré le déferlement des vagues hautes qui occasionnaient de dangereuses embardées au Dallas, le pilote calme et obstiné, guida le destroyer à travers les vagues et entre les jetées. Les mitrailleuses ouvrirent le feu, mais à l'aube, ils avaient réussi à s'infiltrer et pouvaient voir le barrage.

Malevergne fut consterné de ce qu'il découvrit. Le filet métallique avait été coupé sur le côté nord, là où l'eau était trop peu profonde pour permettre le passage du Dallas. Il faudrait donc enfoncer le barrage à l'endroit souhaité par le pilote. Avant d'atteindre ce point, le destroyer toucha le fond et commença à être battu par les vagues. En mettant toute la puissance, Malevergne réussit à le dégager, sur une trop courte distance de la vase où il était embourbé.

C'est alors que des canons de 75 mm ouvrirent le feu depuis la casbah. Un gros obus s'abattit dans l'eau juste devant le Dallas, au moment où il s'approchait de l'obstacle, et un autre souleva sa poupe de la vase. Le français accéléra à 18 nœuds, heurta un point du barrage situé à mi distance entre deux flotteurs, l'écarta, puis réduit rapidement la vitesse à 15 nœuds pour remonter le fleuve.

Bien que Malevergne n'ait plus vu le fleuve Sebou depuis plus de deux ans, il pouvait encore se rappeler, avec assez d'exactitude, la position des bancs de sable qui changeaient d'une saison à l'autre. Aujourd'hui, il devait faire face à un danger supplémentaire : huit cargos avaient été coulés dans le chenal par les français.